Les enseignements à tirer de l’annulation du PLUi de Metz Métropole

Par jugement n° 2404936 du 24 juillet 2025, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé a annulé le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de Metz Métropole approuvé par délibération du 3 juin 2024 du conseil métropolitain.

Le Tribunal a notamment jugé que le PLUi méconnaissait le principe dit « d’équilibre », qui consiste à concilier plusieurs objectifs d’urbanisme, dont l’équilibre des populations résidant dans les zones urbaines et rurales, le développement économique, l’utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection de l’environnement.

Ce principe d’équilibre, fondé sur l’article L. 101-2 du Code de l’urbanisme, revient en force dans la jurisprudence récente relative au contentieux des documents d’urbanisme. Motif d’annulation quelque peu oublié par le passé, il ressort de ce jugement comme de plusieurs décisions récentes lorsque le document d’urbanisme ne maîtrise pas suffisamment le développement urbain :

  • Annulation du PLUi de Monfort Communauté au motif que son PADD était entaché de contradiction en affirmant que « le mode de développement engagé vise à réduire la consommation d’espace sur le territoire » tout en prévoyant une augmentation de l’ouverture à l’urbanisation des espaces naturels, agricoles et forestiers sur le territoire de 15% (TA Rennes, 6 mai 2024, n° 2102647) ;
  • Annulation du PLUi valant SCOT de Questembert Communauté au motif que son rapport de présentation et les données démographiques récentes, ne permettent ni de justifier l’objectif d’accueil de 5 000 habitants supplémentaires à l’horizon 2029 (le double de celui-ci projeté compte tenu des données récentes), ni de la construction, en conséquence, de 2 750 logements sur la période pour une enveloppe de consommation foncière totale de 125 hectares ;
  • Annulation du SCOT de l’agglomération de Thionville au motif que l’artificialisation supplémentaire retenue par le SCoT, qui avait pour objectif la construction de 28 738 logements, ne semblait pas correspondre effectivement à un besoin de la population (CAA Nancy, 11 avril 2024, n° 23NC00784) ;
  • Annulation du SCoT du Pays de la Maurienne en l’absence de maîtrise de l’étalement urbain sur des zones de montagne aux intérêts environnementaux et patrimoniaux importants ainsi qu’en l’absence de solution pérenne pour garantir l’effectivité de l’activité touristique et plus largement économique des stations dans la durée (TA Grenoble 30 mai 2023, n° 2002427, 2004369, 2004919, CLASSE C+).

Par ailleurs, en matière consommation foncière, le jugement du 24 juillet 2025 tranche, pour la première fois, l’épineuse problématique de la divergence entre les données de consommation d’espaces naturels agricole et forestier (ENAF) produites par l’observatoire national de l’artificialisation des sols et les données locales utilisées par les auteurs de documents d’urbanisme.

Ce point est essentiel puisque, selon la façon de décompter la consommation d’ENAF passée, l’objectif fixé pour l’avenir est plus ou moins ambitieux, plus ou moins sincère.

Voici ce que le Tribunal juge sur ce point :

« 37. Or, le portail de l’artificialisation des sols de l’Etat, qui constitue la base de données de référence au titre de l’article R. 101-2 du code de l’urbanisme, évaluait la consommation foncière sur la période de référence à 336,9 hectares sur le territoire concerné. Librement disponibles en ligne en février 2024 soit antérieurement à la décision attaquée, ces données autorisent donc le PLUi à ouvrir près de 170 hectares à l’urbanisation, soit environ la moitié de ce que prévoit le plan en litige. Pour justifier les chiffres retenus dans le PLUi, la métropole fait valoir qu’elle a utilisé les données du portail de l’artificialisation des sols mais également celles de la base OCS de la région Grand Est, qui permettraient une analyse plus fine du territoire à l’aide de photographies satellites. La métropole n’apporte toutefois aucun élément de nature à éclairer la méthodologie qu’elle dit avoir retenue ni aucun élément probant au soutien de son estimation. Ainsi, eu égard à l’écart significatif entre le chiffre pris en compte par les auteurs du PLUi et celui du site officiel, écart qui avait vainement suscité des interrogations tant de l’autorité environnementale que de la commission d’enquête, Metz Métropole ne saurait faire valoir que la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers passée retenue par le PLUi reflète la consommation réelle durant les 10 dernières années précédant l’approbation du plan. A ce titre, le rapport de présentation est entaché d’une insuffisance substantielle ».

A la lumière de ce jugement, les auteurs de schémas régionaux, SCoT, PLU(i) sont invités à :

1/ Faire l’exercice de comparaison des données disponibles localement avec les données de l’observatoire national, en évitant de passer cette question méthodologique sous silence ;

2/ Expliquer, dans leur rapport de présentation, la méthodologie retenue si elle devait être différente de celle de l’observatoire national, en démontrant son caractère sincère et en soulignant les biais que l’on a pu chercher à éviter ;

3/ Eviter absolument de présenter une consommation d’ENAF radicalement différente ou incohérente de celle qui est issue des données de l’observatoire national (c’est bien la disproportion significative que censure le Tribunal dans son jugement du 24 juillet 2025).

Accéder au communiqué de presse et au jugement du TA Strasbourg 24 juillet 2025, n° 2404936, 2405457