Loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement

Adoptée par l’Assemblée nationale le 15 octobre 2025 après un examen en commission mixte paritaire, la loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement a été déférée au Conseil constitutionnel par 60 députés (accéder à la saisine ici).

Par décision DC n° 2025-896 du 20 novembre 2025, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la constitutionnalité de plusieurs de ses dispositions, censurant certaines d’entre elles (voir nos explications à la fin de cet article).

La promulgation de la loi, expurgée des dispositions jugées contraires à la Constitution, est à présent imminente.

Dispositions relatives au contentieux de l’urbanisme

La loi de simplification du droit de l’urbanisme comporte des nouveautés importantes en matière de contentieux de l’urbanisme, dont certaines sont de véritables chausse-trappes :

  • Réduction du délai dans lequel un recours gracieux ou un recours hiérarchique peut être introduit à un mois seulement contre deux mois auparavant (mais la collectivité disposera toujours d’un délai de 2 mois pour répondre, quant à elle).
  • Attention : le délai de recours contentieux n’est plus prorogé par l’exercice d’un recours gracieux ou d’un recours hiérarchique.
  • Limitation des possibilités de substitution de motifs : l’administration ne pourra plus y procéder que dans un délai de deux mois à compter de l’enregistrement du recours contre le refus d’autorisation (L. 600-2 du Code de l’urbanisme).
  • Suppression pure et simple de l’article L. 600-1 du Code de l’urbanisme et donc de la possibilité, sous certaines conditions, d’invoquer des vices de forme et de procédure d’un SCoT, d’un PLU(i) ou d’une carte communale par voie d’exception (au motif d’un alignement avec la jurisprudence CFDT Finances, voir CE Ass., 18 mai 2018, CFDT Finances, n° 414583, publié au Recueil).
  • Présomption d’urgence pour tout référé suspension dirigé contre un refus de permis de construire, un refus de permis de démolir ou contre une opposition à déclaration préalable (création d’un nouvel article L. 600-3-1 du Code de l’urbanisme).

Attention, l’entrée en vigueur de ces dispositions est en partie différée :

  • La limitation des possibilités de substitution de motifs sera applicable « aux recours en annulation ou aux demandes tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant une décision mentionnée au second alinéa du même article L. 600-2 qui ont été enregistrés au greffe de la juridiction après la publication de la présente loi ».
  • La présomption d’urgence en référé contre des décisions de refus ou d’opposition s’appliquera à tous les référés introduits après la publication de la loi.

Dispositions relatives aux documents d’urbanisme

La loi modifie la gamme des procédures d’évolution des SCoT et des PLU(i).

La procédure dite de « modification simplifiée » est supprimée.

Ne restent plus que les procédures de révision et de modification (le tout combiné à un recours facilité à la participation du public par voie électronique, aux lieu et place de l’enquête publique).

Le champ d’application des deux procédures d’évolution des documents d’urbanisme a, il faut le reconnaître, été réellement simplifié. Les hésitations provoquées notamment par l’article 194 de la loi Climat et résilience, seront levées à l’avenir puisque la « ZANification » (ou « climatisation« ) des documents d’urbanisme se fera selon la seule procédure de modification.

Le SCOT pourra ainsi évolué selon la nouvelle procédure unique de modification dans toutes les hypothèses sauf lorsqu’il est envisagé des changements portant sur les orientations définies par le projet d’aménagement stratégique (PAS). Dans ce dernier cas, le recours à la procédure de révision s’imposera.

Et même dans cette hypothèse, la loi prévoit des exceptions, notamment lorsque le PAS évolue pour soutenir le développement de la production d’énergie renouvelable ou de la production d’hydrogène renouvelable ou bas-carbone ou du stockage d’électricité ou de définir des zones d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables.


En matière de PLU(i), la procédure de modification (dite de droit commun) devient également la norme.

La révision est réservée au changement des orientations du PADD, sous réserve là aussi de plusieurs exceptions notamment pour les changements du PADD relatifs à la production d’énergie renouvelable, la délimitation des zones exposées au recul du trait de côte et de l’intégration de l’objectif ZAN.

Ces dispositions entreront en vigueur six mois après la promulgation de la loi. Elles ne s’appliquent pas aux procédures d’évolution en cours à cette date.

Sur ce point, la loi de simplification du droit de l’urbanisme pourrait inciter à une rédaction des PAS et des PADD réellement stratégique, moins délayée, ne portant que sur les équilibres et les choix essentiels pour le territoire.

Fusion PLU(i) + SCoT mono-EPCI

Est créé un nouvel article L. 146-1 du Code de l’urbanisme qui prévoit la possibilité d’un document d’urbanisme unique ayant les effets d’un SCOT et d’un PLU(i) :

« Lorsque le périmètre d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de document d’urbanisme recouvre exactement le périmètre d’un schéma de cohérence territoriale, ledit établissement peut élaborer un document d’urbanisme unique ayant les effets d’un schéma de cohérence territoriale et d’un plan local d’urbanisme intercommunal ».

Urbanisme opérationnel

La loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement comporte plusieurs innovations en matière d’urbanisme opérationnel :

  • Institution d’un permis d’aménager multi sites qui pourra être obtenu pour des unités foncières non contiguës sous réserve d’unité architecturale et paysagère, si la demande est déposée par un demandeur uninque et que le projet constitue un ensemble unique et cohérent (nouvel article L. 442-1-3).
  • Renforcement des sanctions contre les constructions illégales : amende administrative allant jusqu’à 30 000 € et relèvement des astreintes journalières à 1000e du plafond (article L. 481-1 modifié).
  • La loi ajoute des dispositions spécifiques, dans le Code de l’urbanisme, concernant la réfection et la surélévation des constructions : « Lorsqu’une construction régulièrement édifiée fait l’objet d’une demande d’autorisation d’urbanisme concernant des travaux de surélévation ou de transformation limitée d’un immeuble existant, l’autorisation d’urbanisme ne peut être refusée sur le seul fondement de la non-conformité de la construction initiale aux règles applicables en matière d’implantation, d’emprise au sol et d’aspect extérieur des constructions ».
  • Cristallisation des règles d’urbanisme au profit des permis de construire et des permis d’aménager modificatifs : les règles applicables au PC ou au PA initial restent valables pendant 3 ans en cas de PCM et si les travaux autorisés par le PC initial ne sont pas achevés (nouvel article L. 431-6 du Code de l’urbanisme/ nouvel article L. 441-5). Par dérogation, la demande de PCM peut être refusée ou assortie de prescriptions spéciales si les dispositions d’urbanisme intervenues après la délivrance du permis de construire initial ont pour objet de préserver la sécurité ou la salubrité publiques.

Autres dispositions

L’article 40 de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergie renouvelable est modifiée pour introduire des adaptations aux moyens de remplir les obligations concernant notamment les parcs de stationnement.

Enfin, relevons plusieurs dispositions spécifiques portant sur le territoire particulier de la Défense, sur les résidences hôtelières à vocation sociale et sur les constructions de nouvelles installations nucléaires.

Décision du Conseil constitutionnel du 20 novembre 2025

Le Conseil constitutionnel a censuré, dans sa décision du 20 novembre 2025, l’une des dispositions les plus contestées de la loi.

Il a jugé que la disposition (art. 26, 4 ° du paragraphe I) modifiant l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme), qui subordonnait la possibilité de saisir le juge administratif d’un recours contre un document d’urbanisme à la condition d’avoir préalablement participé à la procédure de participation du public, méconnaît le droit à un recours effectif protégé par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Il relève, en particulier, qu’une telle limitation portée au droit d’agir en justice contre ces actes règlementaires prive les justiciables qui n’ont pas pris part à la procédure de participation de la possibilité de soumettre au juge une illégalité y compris lorsque celle-ci est apparue postérieurement à cette procédure de participation.

Il a également censuré pour des motifs procéduraux (relatifs aux conditions d’amendement) plusieurs dispositions techniques moins structurantes, notamment :

  • L’attribution d’un identifiant unique à chaque bâtiment enregistré dans un référentiel national des bâtiments.
  • La possibilité d’instaurer localement une obligation déclarative des changements de sous-destinations au sein d’une même sous-destination, censurée comme cavalier législatif.
  • La suppression de l’obligation de réaliser une étude d’optimisation de la densité des constructions dans la zone d’une action ou opération d’aménagement soumise à évaluation environnementale.
  • Les dispositions relatives aux conventions d’utilité sociale conclues par les organismes d’habitations à loyer modéré.
  • La réduction de 30 à 15 ans du délai à l’issue duquel une succession ouverte non réglée peut entrainer l’application du régime des biens sans maître prévu par l’article L. 1123-1 du Code général de la propriété des personnes publiques.

La décision DC n° 2025-896 du 20 novembre 2025 est à lire ici.